Le Royaume de la politesse: l'identité des femmes à la période des Lumières et de la culture salonnière

Comme nous dit Dena Goodman, “the salonnières were practical people who worked at tasks they considered productive and useful”. Ces femmes travaillaient activement au projet des Lumières sans aucune frivolité. En revanche, elles croyaient aux valeurs des Lumières en cherchant à les réaliser.
Le siècles des salons était un siècle fondé aussi sur le pouvoir et le travail des hommes ; cependant ces maîtresses ont commencé à développer leur carrière et elles ont ouvert la voie à l’indépendance. Ces femmes étaient intelligentes et fortes, elles étudiaient et elles apprenaient avec attention, afin de construire un salon célèbre et apprécié de tous.

Suzanne Necker est la première salonnière que nous étudierons. Goodman souligne que “the word attention dominates the five volumes of her journal published after her death by her husband”. Cela nous montre bien le sérieux de cette femme: elle prêtait une grande attention aux détails, aux conversations et aux discussions qui se déroulaient autour d’elle, ainsi comme à l’organisation du salon. Il s’agit d’une femme pratique qui pense à une finalité spécifique, celle de la réalisation de la pensée des Lumières. Par conséquent, elle avait construit un salon digne des philosophes et des hommes de lettres, un salon destiné à être célébré et rappelé pour toujours. Nous pouvons voir que ces femmes du XVIII siècle étaient énergiques et puissantes, en déchirant l’image traditionnelle de superficialité et d’infériorité des femmes. Les femmes ont le droit d’aboutir à leurs buts sans se cacher derrière une figure masculine.

Ainsi était Mme Necker, laquelle ne se concédait pas le luxe de se distraire. Elle était rigoureuse et sa discipline était aussi appliquée aux habitués de son salon, afin de les amener à la connaissance de l’esprit des Lumières. Le discours dans son salon était le moyen de focaliser l’attention de ses hôtes sur la politique de l’illuminisme. L’éducation de Necker était construite sur la lecture et sur la réflexion faite sur ce qu’elle lisait. En effet, il était important pour une salonnière d’être à même d’argumenter et de discuter avec ses habitués, en laissant en même temps un espace pour converser entre eux.

Les salonnières du XVIII siècle cherchaient à changer un temps caractérisé par la superficialité et la frivolité, à travers la création d’un lieu identifié comme convenable au projet des Lumières et à une conversation enrichissante. Un aspect particulier de la République des Lettres est qu’elle était fondée sur l’amitié. Le salon est devenu ainsi un lieu où conjuguer la discussion philosophique et les relations d’amitié, qui jusqu’à ce moment-là étaient exclusivement un privilège des hommes. Il s’agit donc d’un changement fondamentale apporté dans la société aristocratique, en poursuivant le débat sur la condition des femmes commencé à la fin du XVII siècle : ces salonnières ont instauré des relations amicales entre hommes et femmes, même si la plupart des gens étaient sceptiques et la création des salons ne suffisait pas à détruire des croyances enracinées depuis longtemps.

Toutefois, on doit rappeler qu’il s’agissait d’un monde aristocratique qui permettait à ces femmes d’utiliser le pouvoir de l’argent et le nom de leur famille d’appartenance pour gagner du respect. Le monde des pauvres était bien différent et le domine des hommes était insurmontable. Par conséquent, la culture salonnière était limitée aux élites urbanes.

Necker, Geoffrin et Lespinasse, ces trois salonnières ont réuni des gens orientés vers la sociabilité, en donnant une régularité à ces rencontres. Voilà la caractéristique des salons du XVIII siècle, c’est-à-dire l’idée qu’il y avait des jours fixes pendant lesquels tous les philosophes qui voulaient réaliser le projet des Lumières, devaient se rencontrer et converser, en respectant toujours les règles de la politesse et la présence de la maîtresse. La régularité et le sérieux dans les salons parisiens ont constitué la valeur de ces lieux en dévalorisant en même temps les autres types de rencontres qui n’étaient pas à la hauteur des salons de Paris. L’abbé Galiani l’affirme dans une lettre à Mme d’Épinay, dans laquelle il dit sans aucune hésitation que leurs "vendredi" à Naples étaient beaucoup différents du caractère des rencontres dans les salons de France, et il ajoute que Naples ne peut pas ressembler à Paris, sans une femme qui puisse guider et organiser les philosophes comme Mme Geoffrin.